Le tax shelter étendu aux jeux vidéo : ça se précise

On ne change pas une formule qui gagne. C’est certainement ce que se sont dit quelques parlementaires libéraux flamands (Vincent Van Quickenborne, Luk Van Biesen, Dirk Van Mechelen) de l’Open VLD lorsqu’ils ont déposé en ce début mai leur proposition de loi sur l’extension du système de tax shelter au secteur du jeu vidéo. C’est que le système introduit il y a quelques années, et qui permet de financer le secteur audiovisuel, a été couronné de succès. L’avantage fiscal mis en place pour compenser la prise de risque dans un secteur lourd en investissements a attiré pas mal d’investisseurs. Et, partant, permis la création d’emplois. Dans l’exposé des motifs de cette proposition de loi, l’Open VLD fait naturellement référence au succès de la formule du tax shelter dans l’industrie audiovisuelle. Un succès d’autant plus grand que la mesure, depuis février 2017, a été étendue des maisons de production du monde cinématographique et télévisuel aux compagnies et arts de la scène.

Bron: La Libre Belgique

La Belgique à la traîne

Avant d’aborder les raisons qui ont poussé l’Open VLD à déposer cette proposition de loi, rappelons que le tax shelter est un incitant fiscal qui permet aux entreprises d’investir une partie de leurs bénéfices dans une œuvre – cinématographique depuis 2004 et désormais aussi scénique – en se voyant octroyer un avantage fiscal (exonération de 310 % du montant) et un rendement financier (4,5 %) plus que correct, à la hauteur du risque généralement encouru dans ce secteur particulier. L’exonération fiscale est permise à hauteur de maximum 50 % des bénéfices réservés imposables de la période concernée, avec un plafond de 750 000 euros. Ce rappel étant fait, l’Open VLD estime que l’industrie belge du jeu vidéo aurait tout intérêt à être soutenue. Alors que le secteur pesait plus de 108 milliards de dollars de chiffre d’affaires dans le monde en 2017, loin devant les secteurs de l’industrie de la musique et du cinéma, en Belgique, il s’élève à moins de… 50 millions d’euros. “ Malgré une croissance rapide, on constate que le secteur belge des jeux vidéo est aux prises avec d’importants problèmes pour atteindre les sommets ou même garder la tête hors de l’eau ”, notent les parlementaires.

Pourquoi donc est-il si difficile de percer dans un secteur pourtant porteur? D’abord, note l’Open VLD, “ ce secteur requiert du personnel très qualifié… en pénurie, et qui coûte donc très cher. Ensuite, le résultat commercialisable n’arrive qu’en fin de processus, qui peut durer de plusieurs mois à plusieurs années” . En d’autres termes, le secteur est très risqué!

En attendant le grand marchandage…

Enfin, outre le fait que ce secteur connaît un intérêt grandissant auprès du grand public, le jeu vidéo héberge également les embryons d’une nouvelle forme de culture, à caractère éducatif. Et l’Open VLD de citer, par exemple, le développement des capacités de coordination, le renforcement de la conceptualisation spatiale et visuelle, etc. Aspect éducatif qui se retrouve aussi dans le type de jeu que l’industrie peut amener sur le marché. “ Des jeux comme ‘Age of Empires’ apprennent beaucoup aux jeunes sur l’histoire ”, relèvent ainsi les trois parlementaires.

Grande question : quelles sont les chances que cette proposition de loi poursuive avec succès son parcours parlementaire? Eh bien elles sont grandes. Contactés, les partenaires de la suédoise ne se montrent pas opposés. Le CD&V soutient l’idée, ce que confirme également Vincent Van Quickenborne. Du côté du MR, on précise qu’on n’a pas encore cosigné le texte. “ On reste ouvert à la discussion et on attend d’étudier plus avant leur proposition avant d’y souscrire même si, a priori, on est d’accord avec le principe .” Seule la N-VA se montre plus timorée, “ pour des raisons purement stratégiques” , nous explique-t-on dans les rangs gouvernementaux : “ Nous avons récemment étendu le système tax shelter et nous suivons d’abord son évolution avant de songer à de nouveaux systèmes ”, explique-t-on au cabinet de Johan Van Overtveldt, ministre des Finances.

En réalité, si personne n’est opposé à l’idée de cette extension, chacun attend le grand marchandage des demandes en conclave budgétaire pour se positionner définitivement. Le coût ne devrait pas être énorme – quelques dizaines de millions d’euros -, mais il serait porté au passif de l’Open VLD dans le cadre des négociations budgétaires. “ Il ne faut pas non plus oublier l’aval de la Commission européenne ”, ajoute Vincent Van Quickenborne. La Commission n’a pas fait trop de problèmes lors du lancement du système, ni à sa première extension en février 2017. Il n’y a pas de véritable raison qu’il en soit autrement pour la seconde.François Mathieu

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François Mathieu ■